La Fée lit, regarde, joue et commente le tout.
Quatrième de couverture : Pour Durzo Blint, l'assassinat est un art. Et il est
l'artiste le plus doué de la ville, ses talents sont requis de la sombre allée au boudoir de la Cour.
Pour Azoth, la survie est précaire. Quelque chose que tu ne considères jamais comme acquis. En tant que rat de guilde, il a grandit dans les taudis et apprit par la manière forte à juger les gens rapidement - et à prendre des risques. Des risques comme devenir l'apprenti de Durzo Blint.
Mais pour être accepté, Azoth doit tourner le dos à son ancienne vie et à adopter un nouveau nom et une nouvelle identité. En tant que Kylar Stern, il doit apprendre à naviguer dans ce monde d'assassin rempli de dangereuses politiques et de magies mystérieuses - et de développer un certain goût pour la mort.
(Résumé traduit par moi-même)
Avis : Je suis rarement déçue par de la dark fantasy. D'ailleurs, j'ai beau chercher, je ne me souviens pas d'un livre de dark fantasy que je n'ai pas apprécié. The Way of Shadows ne fait pas exception. Je l'ai dévoré, non, plutôt savouré à sa juste valeur. Un vrai petit bijou que je recommande chaudement à tous les amateurs.
Le résumé du quatrième de couverture est très bien. Il raconte brièvement l'histoire sans dévoiler des moments clés de l'intrigue. Bon, il est vrai que cette histoire d'assassin fait penser, pour les gamers, à Assassin's creed, mais je vous rassure, aucun rapport.
Azoth est un gamin de 11 ans qui survit péniblement dans les taudis de la capitale de Cenaria. Il fait partie d'une des nombreuses guildes de gosses des rues qui se battent pour avoir les meilleures rues du quartier pauvre mais surtout pour leur survie. Azoth survit péniblement tout en prenant soin d'une petite fille muette, mais jolie, Doll Girl. Il peut aussi compter sur son meilleur ami, Jarl. Mais cette enfance difficile va être piétiné par Rat, un grand de la guilde, qui menace la sécurié de Doll Girl et qui réduit Jarl à l'état de chose pour assouvir son bon plaisir. Azoth commence alors à se rebeller, mais il va avoir bientôt à faire un choix. Quitter cette vie sans regarder derrière lui pour devenir l'apprenti du légendaire assassin, Durzo Blint, ou continuer à vivre cette vie misérable où sa sécurité et celle de Doll Girl est de plus en plus menacée...
Autant dire que dès le début du livre, on est plongé dans une ambiance sombre et sale. Azoth et ses compagnons ne sont que des gamins mais la vie ne leur épargne rien, y compris les pires horreurs. Et quand Azoth hésite, il doit en subir les conséquences. Une leçon qu'il retiendra toute sa vie...
Azoth est donc notre héros. Un héros qui n'a rien en commun avec les héros habituels. Nous le suivons et le voyons évoluer sur plus de 10 ans, de ses 11 ans à la vingtaine. Et cela nous permet de comprendre comment le personnage évolue, pourquoi il fait certains choix, comprendre ses tourments et ses hésitations. Vous avez compris, Azoth est quelque peu torturé (d'un côté, il y a de quoi) mais il n'en est pas moins attachant. L'auteur évite de tomber dans le piège du héros qu'on a envie de claquer tellement il est pathétique. Là, il n'en est rien. Azoth a ses blessures, certaines très profondes, mais il ne tombe pas dans le pathétique et continue à aller de l'avant, même en sachant qu'il ne fait pas les bons choix. C'est aussi un personnage qui monte en puissance brute, sans que cela devienne du n'importe quoi. Même vers la fin du livre, alors qu'il est devenu un assassin brillant, il fait encore des erreurs. Il a encore des adversaires puissants qui lui font peur. Ce n'est pas un dieu malgré sa puissance. Je vais arrêter de disserter sur Azoth, mais je l'ai beaucoup apprécié, à la fois pour son côté assassin brillant et pour son côté humain torturé.
Autre personnage phare du livre, Durzo Blint, le maître d'Azoth, est aussi une personnalité complexe et passionnante. Il est terriblement dangereux et effrayant dans sa manière de voir la vie et la mort ("Life is empty. Life is worthless. When we take a life, we aren't taking anything of value."). Il est au summum du "practical", il fait toujours ce qu'il y a à faire, même si cela signifie tuer des êtres qui lui sont chers. Et pourtant, ce personnage ne cesse de nous étonner tout au long du livre, l'auteur s'amusant vraiment avec ce personnage, le maitrisant à la perfection.
Outre les deux personnages clés du livre que sont Azoth et Durzo, the way of shadows nous introduit de nombreux personnages secondaires, tous très bien développés. Logan, le jeune noble fougueux et gentil, Jarl, le meilleur ami d'Azoth, Doll Girl, la belle gamine muette, le Comte Drake, Momma K... Mais aussi Dorian, un puissant prophète et ses compagnons, Solon et Feir. Il serait trop long de détailler tous ces personnages sans révéler l'intrigue, mais ils sont tous bien développés, attachants et intéressants. Je suis très fan de Dorian, source de nombreux fous rires lors de ma lecture. Par contre, Doll Girl est beaucoup plus fade et n'a pas une grande utilité dans l'histoire (elle en a une, mais disons qu'elle est vraiment à part des évènements). C'est vraiment mon seul reproche au livre.
Et oui, bien que l'univers soit sombre, le livre est parsemé de touches d'humour bienvenues, qui font sourire, voir même franchement rire. Azoth a quelques belles répliques, mais la palme revient à Dorian, puissant prophète qui assume sa condition et à l'origine de situations drôlement cocasses. D'ailleurs, en parlant de Dorian, l'auteur se sort brillament de l'exercice prophète. Pour une fois qu'on a un prophète qui assume ce qu'il est (parce que les prophètes torturés, ça va 5 minutes...) et qui agit au lieu d'être tout passif à débiter ses prophéties d'une voix d'outre-tombe, c'est rafraichissant et pour le coup, original. En plus, il n'a pas peur de se servir de ses pouvoirs, hallelujah ! Petit exemple parce que je ne peux pas résister. A un moment, Dorian et Feir sont séparés de Solon et ils cherchent à le retrouver. Dorian utilise son pouvoir et soudain crie à Feir, "Ouvre la porte de la maison ! Maintenant !" Feir s'exécute et ouvre la porte qui donne sur la rue et tombe nez à nez avec... Solon qui passait pile à ce moment par cette rue, sans savoir que Dorian et Feir étaient là ! Rien que pour ça, monsieur Brent Weeks, je vous vénère !
L'intrigue n'est pas en reste. Elle est passionnante, parfaitement menée et se termine sur un superbe final et une fin pleine de promesses pour la suite (et oui, c'est le premier tome d'une trilogie). Elle est de plus complexe, pleine de surprise et n'épargne rien, ni personne. Oui, les personnages en chient sérieusement et certains ne seront sans doute plus jamais les mêmes après les épreuves qu'ils auront traversées. Je ne veux pas en dire trop dessus étant donné que cela gâcherait vraiment le plaisir de se laisser happer par l'histoire que nous conte brillament Brent Weeks.
D'ailleurs, Brent Weeks se débrouille vraiment très bien pour introduire petit à petit les différentes pièces de son univers. Tout est présenté subtilement et au fur et à mesure. Nous n'avons pas des pages d'explications sur ce qu'est l'univers ainsi que sa situation politique. Tout vient petit à petit, simplement et clairement expliqué quand le lecteur en a besoin. Cela donne un récit qui progresse vers plus de complexité tout en douceur, sans perdre le lecteur dans de longues explications laborieuses. On commence à l'échelle du quartier d'Azoth avec les guildes et la mafia locale (Sa'kagé) pour finir par un conflit entre deux pays où entre en jeu la magie (extrèmement puissante et dangereuse dans cet univers, mais rare) et des intrigues politiques. De plus, les descriptions, qui mal faites plombent un récit jusqu'à la nausée, sont ici rapides et claires. La place est donnée à l'action et l'auteur ne s'attarde pas sur de l'inutile. Bref, une écriture fluide, claire et dynamique (les combats sont un plaisir à lire car compréhensibles) qui sert parfaitement une intrigue passionnante et des personnages hauts en couleurs.
Vous avez compris, j'ai a-do-ré ce livre. Un vrai plaisir à lire. Je le recommande chaudement aux amateurs de bonne dark fantasy. Je suis très curieuse de lire la suite et de retrouver certains personnages pour voir comment ils vont évoluer. Et ça tombe bien, le tome 2 m'attend sagement et me fait franchement de l'oeil.